L’IA au devant de la scène
L’intelligence artificielle a été propulsée au devant de la scène depuis que le grand public a découvert l’intelligence artificielle générative proposée par la société OpenAI et son ChatGPT qui fait beaucoup de choses comme un humain en donnant des réponses bien rédigées aux questions qu’on lui pose à propos de presque tout. Les capacités de l’IA générative et des différentes solutions dans ce domaine se sont rapidement démultipliées depuis le lancement de ChatGPT, le 30 novembre 2022. Il est désormais possible de générer non seulement des textes mais aussi des images, des vidéos, de la musique, etc. … Des modèles puissants permettent maintenant de résoudre même certains problèmes des olympiades de mathématiques réputés très difficiles et nécessitant des raisonnements complexes.
Pourquoi dit-on que l’IA a besoin des maths ?
Mais qu’est-ce qui se cache derrière ces petits monstres qui répondent quasi-instantanément à nos questions avec une marge d’erreur très limitée ? Ou encore de quoi a-t-on besoin pour construire des « modèles » qui, en arrière-plan, exécutent les tâches qui permettent de générer des réponses. La réponse est que les outils essentiels pour réaliser ces modèles sont certaines branches des mathématiques. En effet les algorithmes du « machine learning » qui constitue une composante essentielle des modèles de l’IA, sont basés sur au moins cinq domaines des mathématiques à savoir :
- L’algèbre linéaire
- La géométrie analytique
- Le calcul vectoriel
- Les probabilités et les statistiques
- L’optimisation
Il est bien connu que la « matière première » des modèles de l’Intelligence Artificielle est le « data » et que la montée en puissance de l’IA ces dernières années est le résultat de l’explosion des données suite à l’avènement de l’Internet depuis les années 90 du siècle précédent qui a créé le besoin de traiter les données massives qu’il génère. Ce fut d’abord le « miracle » Yahoo et Google qui, grâce à l’IA, ont développé les outils de fouille de données pour développer leurs moteurs de recherche. Le ChatGPT de OpenAI (dont Microsoft est devenu un partenaire privilégié), Gemini de Google et d’autres fournissent maintenant une couche supplémentaire qui simule le raisonnement humain et ne se contente pas de chercher du contenu à partir de certains mots clés.
L’implémentation de modèles d’intelligence artificielle, la personnalisation de modèles existants ou la création de nouveaux modèles nécessite diverses compétences et à des niveaux divers. Les principaux métiers de l’IA sont : Data Scientist, Architecte Data, Data Analytics Manager, Ingénieur Machine Learning. Et la majorité de ces métiers nécessitent des connaissances plus ou moins approfondies des disciplines mathématiques citées plus haut.
Place des maths dans le système éducatif tunisien
L’intelligence artificielle est un domaine transversal. Autrement dit, ses applications couvrent toutes les activités humaines et toutes les formations universitaires. Les praticiens de l’IA sont appelés à maîtriser les outils essentiels propres à ce nouveau domaine en plus d’autres connaissances dans le domaine où ils comptent l’appliquer de manière à en tirer le meilleur profit. Ceci nous amène au constat que l’apprentissage des connaissances essentielles en mathématiques doivent être acquises dès le début de la formation des élèves et consolidée progressivement à travers les étapes du collège, lycée et université. En plus, ces connaissances de base ne doivent pas être réservées aux sections scientifiques mais inculquées à des degrés divers à toutes les spécialités et notamment aux sections d’économie et de gestion qui peuvent être amenés, lors de leurs études supérieures, à virer vers une formation étroitement liée à l’IA et à opter pour une carrière qui lui fait appel. En outre, si l’on veut préparer une génération de concepteurs et de créateurs dans ce domaine en pleine évolution, et pas seulement de bons utilisateurs de l’IA, il est nécessaire de renforcer les sections mathématiques au niveau du secondaire qui sont seules à même de donner une formation complète en mathématiques pour couvrir tout le spectre des compétences nécessaires pour concevoir et développer de nouveaux modèles d’IA. Malheureusement, on observe, depuis quelques années, la tendance inverse, c’est à dire le recul du nombre d’élèves dans les sections maths. Cet état de fait devrait interpeller les responsables de l’éducation dans notre pays et les pousser à prendre les mesures nécessaires pour inverser cette tendance. Pour que notre pays soit un acteur et un producteur et non un observateur et un consommateur dans ce domaine.