Métiers d’hier, métiers de demain

Une conférence, des réflexions …

En essayant de récapituler l’essentiel de la conférence de Naceur Ammar (*) sur les métiers du futur, j’ai cherché à commencer par le commencement comme l’a fait le conférencier, c’est à dire à partir de l’apparition de l’homo sapiens sur terre. Et me voilà englouti dans la préhistoire ! Une petite recherche sur internet m’a permis de savoir qu’on situe l’apparition des ancêtres qui nous ressemblent à 300 000 ans. Mais d’abord qu’est ce que l’homo sapiens et comment le caractériser et le différencier par rapport à d’autres bipèdes ? C’est là que j’ai trouvé une définition intéressante pour laquelle la caractéristique principale de l’homme est sa capacité à réfléchir, à concevoir et à transmettre un savoir.

Homo sapiens

Voici un extrait d’un article du site web du « Musée national de l’histoire naturelle (France) » consacré à ce sujet.


La fabrication d’outils, un trait spécifique aux humains ?

Non ! Le fait de créer et d’utiliser des outils ne relève pas du propre de l’humain. C’est plutôt la façon de les créer et la manière dont il s’en sert qui peut permettre de faire une distinction entre les humains et les autres animaux.

En effet, des singes comme les chimpanzés sont tout à fait capables de créer des outils : ils peuvent choisir un bâton, le travailler, l’écorcer et l’affiner, pour ensuite l’utiliser pour dénicher des termites. En revanche, leur fabrication reste sommaire, et ne résulte pas d’une anticipation de toutes les étapes de construction. De façon ponctuelle, ils peuvent produire des éclats de pierre, mais rien n’indique qu’ils sélectionnent les roches en fonction de certaines caractéristiques (comme le poids, le matériau…) ou encore qu’ils utilisent une technique de façon systématique sur celles-ci.

Ce qui change avec l’humain, c’est la conception de cet outil, et la transmission des techniques. Nous avons aujourd’hui des preuves que Paranthropus boisei et Australopithecus garhi, parmi les premiers humains, avaient ces capacités de penser la création d’un outil, contrairement aux singes. C’est dans cette transmission des techniques et dans cette réflexion que résident d’autres caractéristiques de l’humanité.

Concevoir et réfléchir

Un autre indice permettant de définir l’humanité réside en effet dans la capacité à réfléchir. Le fait de fabriquer des outils de façon systématique comme cela a pu être le cas avec Homo habilis est bien la preuve d’une conception avant la réalisation. Ce geste est le plus ancien indice mettant en valeur la capacité à prévoir une action, à la répéter, à maîtriser le geste de la frappe… c’est-à-dire à réfléchir à ce que l’on souhaite obtenir.

Transmettre son savoir

En plus de cette réflexion, la définition d’une « culture » se fonde précisément dans le fait de partager à ses semblables son savoir, puis que ces connaissances se transmettent ensuite de génération en génération. L’exemple de la persistance d’un mode de fabrication d’outils en pierre est bien l’illustration qu’il existe une spécificité humaine dans le fait de se partager les connaissances : ces techniques étaient transmises aux plus jeunes, socialement, et les apprentissages n’ont pas été perdus au fil du temps.

Fin de l’extrait


Lien de l’article:

https://www.mnhn.fr/fr/qu-est-ce-qu-un-humain


Ainsi, il se dégage que l’humanité a commencé avec la fabrication d’outils de manière réfléchie et après les avoir imaginés (conception) avec en plus la capacité de transmettre ces savoirs.

Ces caractéristiques humaines constituent encore aujourd’hui des éléments de base de l’apprentissage et, selon le degré de leur développement chez chaque individu conditionnent son orientation vers le métier le plus conforme à ses aptitudes.

Et la machine intelligente ?

IA

Cette digression m’a été inspirée par la conférence de Naceur Ammar en liaison avec l’irruption fracassante dans l’actualité de l’intelligence artificielle générative en novembre 2023 et son impact sur les activités humaines. En effet l’apparition de l’IA et les prouesses dont elle fait preuve remettent en question l’exclusivité des caractéristiques cognitives humaines puisque désormais les machines sont capables d’avoir des capacités d’analyse, de résolution des problèmes et de production intellectuelle simililaires à celles de l’homme.


Lien avec le début de l’article : l’homme transmet sa principale caractéristique à la machine. Sommes-nous en train de vivre le passage vers une nouvelle ère. Ou est-ce plutôt le début de la fin de l’humanité ?


Retour sur la conférence de Naceur Ammar

Naceur Ammar a utilisé une métaphore instructive mais quelque part apocalyptique en assimilant à 24 h, par une représentation d’échelle, la période de plusieurs milliers d’années depuis la date d’apparition de l’homo sapiens à nos jours. Durant ces 24 h, l’âge de pierre représenterait plus de 23 h, l’âge agricole quelques minutes et nous serions en train de vivre, avec les deux révolutions industrielle et informatique les dernières secondes de ces 24 h. La métaphore montre l’accélération fulgurante de l’évolution technologique. Apocalypse, parce que quand on regarde le futur, à ce rythme d’évolution, on se demande si les structures sociales, voire même la morphologie humaine seront capables de s’adapter aux bouleversements induits par le progrès technologique. Et puis, cette dernière seconde aura-t-elle un lendemain ?

Aujourd’hui, déjà !

Déjà aujourd’hui, le monde des métiers connaît un bouleversement total. Des métiers nécessitant des compétences intellectuelles sont touchés en masse : traducteur, secrétaire de direction, hôtesse de centre d’appel, développeur de logiciels, etc. … Et il est impossible de prévoir quels seront les métiers nécessaires dans un avenir proche.

Naceur Ammar s’adressait aux jeunes étudiants de l’université privée Sesame. Le sujet est fortement intéressant pour les jeunes qui essaient d’entrevoir le chemin vers le futur. En conclusion, la récommandation du conférencier pour faire face à la déferlante technologique et aux changements qu’elle provoque se résume dans trois mots : apprendre, désapprendre et réapprendre …

Mais.

Un autre message devrait être entendu par la société dans sa globalité. L’impact sera subi par tous les secteurs d’activité. Il faut s’y préparer si on ne s’y est pas déjà préparé ! Et vite. Parce que l’évolution est très rapide. Et c’est tout le modèle de développement qui doit être revu pour intégrer les évolutions technologiques et tenir compte de leur impact. L’éducation en premier.

Mais encore … et les maths dans tout ça ?

Oui, les mathématiques sont omniprésentes dans l’arrière boutique de l’intelligence artificielle. Autrement dit, pour ne pas être un simple utilisateur de l’IA et pour maîtriser la création de modèles adaptés à des besoins spécifiques, il est nécessaire de bien connaître certaines branches des mathématiques. Aussi, en faisant le lien avec la nécessité de revoir le modèle de développement pour juguler les défis des nouvelles technologies, on mesure le besoin pressant de redonner une place de choix à l’enseignement des mathématiques.

En guise d’illustration de la présence des mathématiques là où on s’y attend le moins, Naceur Ammar a proposé un jeu qui utilise la loi de Benford.

La loi de Benford est une loi empirique qui affirme que, lorsqu’on étudie une série statistique, le premier chiffre d’un nombre de cette série est 1 pour environ 30 pour cent des nombres de la série, le premier chiffre est 2 pour environ 17 pour cent des nombres et le premier chiffre est 3 pour 12,5 pour cent , etc. … …, jusqu’au premier chiffre qui vaut 9 pour environ 4 pour cent des nombres. 

Le jeu consistait à faire un pari entre deux joueurs. Les deux joueurs cherchent des marchandises de leur choix proposées sur internet et notent à chaque fois le prix de chaque marchandise. Au bout de 50 articles choisis, le joueur n°1 gagne si la majorité des premiers chiffres des 50 marchandises est compris entre 1 et 3 et le joueur n°2 gagne si la majorité des premiers chiffres des marchandises est compris entre 4 et 9. La question est de savoir lequel des deux joueurs va gagner. Contre toute attente, c’est le premier joueur qui gagne … C’est la loi de Benford !

Fin.

(*) Naceur Ammar est

  • Ingénieur diplômé de l’école polytechnique et de l’école des mines de Paris, Ph.D.
  • Expert, consultant, président de l’Advisory Board et membre du Board of Directors de Pristini Knowledge Group
  • Ancien ministre
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